Tout le monde a déjà fait du théâtre. Pourtant, rares sont ceux/celles pouvant se figurer à quel point il nous est proche au quotidien ; encore moins dans la sexualité et l’érotisme ! Pourtant, il y a un endroit où sexe et théâtralité se rejoignent et que chacun connait bien, au moins de nom : le jeu de rôle érotique.
Par MolièreInLove
Le théâtre de l’érotisme
Il y a certaines questions récurrentes quand je parle de théâtre avec le tout-venant. Et parmi celles-ci, il y en a une qui est revenue plus d’une fois : « Est-ce que ça existe, le théâtre érotique ? “. Difficile de s’arrêter à un simple "oui" de ne pas reformuler et de partir dans les déformations expertes.
Cela étant, et la question appelant d’elle-même à des exemples, on pourra nommer : le théâtre élisabéthain et sa grivoiserie charivarienne, la scène sadienne, comique et obscène, Molière et ses tirades aux consonances et sonorités sulfureuses… Concernant ce dernier : en 1661, dans la pièce Les Fâcheux, Madeleine Béjard (amie, amante et co-chef de troupe du dramaturge) apparaissait en naïade, presque nue, parée uniquement d’un drap et de ses quarante-trois années, à la vue des nobles du château de Vaux-le-Vicomte, à une époque où rien n’était plus sexualisé que la figure de l’actrice de théâtre…
Il est toujours difficile d’imaginer que le théâtre puisse accueillir la sexualité en tant que procédé scénique, alors qu‘elle est plus que diffuse et commune au sein des productions cinématographiques. Comment pourrait-il en être autrement ? Il faut dire que le théâtre n’a que récemment cessé d’être systématiquement condamné par la morale, notamment religieuse. Que les théoriciens ont, pour leur grande majorité, totalement éclipsé la question, et qu’aujourd’hui encore, l’apparition d’un nu sur la scène (même désossé de toute tendance érotique) fait encore soulever des voix et des rougissements au sein du public.
La faute enfin à ce qui fait la principale différence entre théâtre et cinéma : la présence. Tandis que le cinéma dispose d’une redoutable capacité à s’exporter, le théâtre demande à être reçu dans un espace et un temps communs à ceux et celles qui en sont les spectateurs.
Si l’érotisme et la sexualité sont, aujourd’hui, plus rares au sein du théâtre, il est étonnant de voir à quel point le théâtre, lui, se retrouve sous bien des aspects au sein de la sexualité. En effet, tous les deux demandent une implication du corps, et une certaine disponibilité de l’esprit ; parfois en se coupant de tout ce qu’il y a au-delà des rideaux et des draps.
Tous les deux demandent une forme de préparation, et ont une multitude de rituels, avant d’entrer pleinement sur la scène. Tous les deux impliquent de dialoguer, d’échanger, ou de soliloquer, avec ou sans paroles, avec un(e)/des partenaire(s) de jeu, d’être à l’écoute de leurs gestes, de leurs sons, de leurs indications de jeu, et de répondre selon l’inspiration et le rythme… Le rapprochement est plus que facile, mais il manque encore quelque chose.
Il manque une chose qui permet, dans les parallèles que nous venons juste de lister, de différencier le théâtre de la performance, de la danse, de la musique ou de toute autre activité de la scène vivante. Ce qui manque, c’est une dramaturgie, une fictionnalitée, une histoire partagée (peut-être même un costume). Et s’il y a bien une section de la sexualité qui accueille de tels éléments, c’est bien le jeu de rôle.
Jeux de rôle érotique, késako ?
La forme érotique du jeu de rôle est une pratique dont le but est de jouer et de mettre en scène une situation, une attitude, une figure ou un personnage, fictif/fictive ou réel(le), afin de transfigurer le fantasme d’un(e) ou plusieurs partenaires.
Souvent conseillé pour "pimenter" la vie sexuelle au sein d’une relation déjà sujette à une certaine forme de complicité et de confiance, le jeu de rôle érotique permet d’apporter une forme de nouveauté (élément d’importance dans le système de récompense du cerveau (Olds & Milner, 1954) en permettant la figuration de situations qu’il serait difficile de trouver d’ordinaire ; tout comme le théâtre permet d’assister à la représentation de scènes et de personnages qu’on ne pourrait voir et entendre d’ordinaire.
Cette figuration permet alors de stimuler le désir et l’excitation du/de la ou des partenaires, et de dupliquer le plaisir à l’aide de l’imaginaire et de son caractère alors palpable et concret. L’imaginaire est, en sommes, invoqué par la représentation, et permet de se plonger dans la sensation et la croyance que le fantasme prend forme face à nous.
Aussi excitante que puisse apparaitre cette pratique, elle peut demander une certaine forme de préparation en fonction du niveau d’implication souhaitée, et nécessaire, entre les partenaires. De fait, et comme pour le théâtre : si le faire n’est pas un plaisir, ça ne vaut pas vraiment le coup. Et donc, quelques fondamentaux sont à garder en tête.
L’ABC théorique du jeu de rôle
Jouer un rôle et s’y impliquer est une chose qui n’est pas (qui n’est plus) nécessairement naturelle et aisée pour chacun. Cela demande (comme dans tout ce qui touche à la sexualité) un peu de préparation et une communication efficace.
Il y a des acteurs et des actrices, même les plus expérimentés, qui considèrent qu’il est bien plus intime d’être vu en répétition par quelques personnes que de se retrouver nu devant des centaines de spectateurs.
Louis Jouvet, acteur et théoricien français de renom, considérant le fait de s’introduire et d’assister aux répétitions d’une troupe comme une “suprême impudeur“ ! Le jeu est une forme d’intimité qu’il est bien moins évident de montrer et de partager que la sexualité dans sa grande généralité. Bien heureusement, cela se travaille, à mesure qu’on monte sur scène, et au lit.
Il m’apparait quatre axes de questionnements permettant de poser au mieux le cadre de cette expérience érotique, et de permettre au jeu de se mettre pleinement en place, pour le plus grand plaisir des exécutants/exécutrices :
- Quel fantasme pourrait-il être envisageable de jouer ? Est-il partagé ? Doit-il l’être ? Qu’est-ce qui est excitant ?
- Lequel des partenaires a envie/se sent de jouer un rôle ? Quel niveau d’implication ? Jusqu’à quel point (est-ce une forme de mise en route, ou est-ce que le rôle est conservé tout au long de l’acte) ?
- Quels sont les moyens pratiques et directifs à mettre en place pour que le fantasme puisse prendre place : canevas, écriture, improvisation, attitude, costume, décors, lieu, mise en scène, ou tout autre élément déterminant dans la figuration du fantasme.
- Quels éléments sont nécessaires afin de garantir la sécurité des participants dans le cadre de l’expérience (notamment dans le cadre de jeux de rôle à caractère BDSM) ?
Ces quatre axes devraient permettre de poser la plupart des bases nécessaires à l’élaboration et l’exécution de l’expérience du jeu de rôle.
Enfin, et pour en finir avec les comparatifs avec le théâtre : l’une des capacités les plus précieuses d’un(e) metteur/metteuse-en-scène, c’est sa capacité à jouer avec les pudeurs de l’acteur/l’actrice qu’il dirige, et de faire comprendre à celui/celle-ci comme cette timidité est un outil précieux à la compréhension de son jeu et de sa propre représentation.
Dans le même ordre d’idée, un(e) bon(ne) camarade de jeu est celui/celle qui a à cœur de rappeler, autant que nécessaire, à son/sa ou ses partenaires, que la pratique d’un rôle doit participer à un plaisir commun, qu’il s’agisse du plaisir d’offrir, de montrer, de partager, d’expérimenter, d’imaginer ; et que sa performance ne sera, à aucun moment, l’objet d’une critique. Si l’on considère que la critique est l’inverse de la mise en scène. Car la mise en scène, c’est chercher, par tous les moyens, à aimer une pièce.
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