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La relation à trois

ou comment le polyamour m’est tombé dessus

L'amour à plusieurs t'intrigue, et tu aimerais en savoir plus ? Ça tombe bien, Melainya nous raconte son expérience de trouple, et comment celle-ci a influé sur sa vision du couple et de l'amour.

La naissance du trouple

Alors que j’étais en couple avec mon compagnon depuis quelques temps déjà, il m’a exprimé l’envie assez nette d’ouvrir notre couple à une troisième personne, en l’occurrence plutôt une seconde femme, moi étant pansexuelle et lui hétérosexuel.

Nous avions depuis le départ une relation ouverte mais de mon côté je ne m’étais jamais positionnée comme polyamoureuse. J’ai presque toujours ressenti le besoin d’avoir plusieurs partenaires sexuel.les, notamment de par mes attirances multiples, mais il n’était pas question de sentiments. J’étais dans une démarche au sein de laquelle il n’y avait d’amour qu’au sein du couple et le reste était vécu avec davantage de légèreté.

Pendant un moment je n’ai su que répondre, n’étant pas fermée à la question mais ne sachant pas comment gérer la jalousie ou la possessivité. Savoir que son conjoint a des maîtresses est une chose, mais le voir avec une autre pour laquelle il affiche clairement des sentiments identiques à ceux que nous partageons ensemble me semblait beaucoup plus dur à accepter.

Nous avions déjà eu quelques expériences sexuelles à trois et cela avait pu être des moments superbes (en général plutôt avec des amis ou des filles pour qui la frontière relationnelle était très claire) et d’autres plus désastreux qui m’avaient quelque peu échaudé.

La relation à trois
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Bien sur, nous avons d’abord cherché une maîtresse régulière car on ne commande les sentiments ou l’installation d’une relation plus soutenue. Sur les sites spécialisés, le succès n’a pas été au RDV malgré un profil de couple très explicite (JOYclub n'était pas encore disponible en France à ce moment-là).

Puis le hasard des choses nous amène à rencontrer l’amie d’amis qui nous plaît à tous les deux. Bien que cela semble mal partie, cette jeune femme se définissant comme hétérosexuelle et plutôt dans des modalités de couple « classique », nous finissons très vite par nous fréquenter avec assiduité jusqu'à ce que cela ressemble à un couple à trois.

C'est quoi le polyamour ?

Contrairement au couple monogame traditionnel, le.la polyamoureux.se peut vivre l'amour (sexuel, romantique..) avec plusieurs partenaires (tous.tes consentant.es). Ce type de relation met en avant la liberté de chaque individu, l'honnêteté, la communication et la confiance en l'autre.

  • Polyamour hiérarchique : Il y a une relation amoureuse principale, c'est souvent le cas des couples qui ont décidé d'ouvrir leur relation à d'autres partenaires.
  • L'anarchie relationnelle : Il n'y a pas de hiérarchie, chaque relation se vit différemment et de façon égale, qu'elle soit amoureuse, sexuelle, amicale, platonique...

Vivre son trouple au quotidien

Évidemment, nous avions une relation préexistante et beaucoup plus installée, mon conjoint et moi et il a fallu faire une place à cette femme pour qu’elle puisse s’y retrouver sans sensation d’être perpétuellement la troisième roue du carrosse. C’est d’ailleurs souvent ce qui a été au cœur de nos difficultés : elle se sentait très souvent exclue ou sur un siège éjectable, sachant que, si cela amenait du trouble dans le couple préexistant, le plus plausible serait que la relation prenne fin.

De plus, nous vivions ensemble mon compagnon et moi et elle, seule, de son côté. Nous avions également des projets d’avenir ensemble qui ne l’incluait pas, en tout cas dans un premier temps. Moi même, je me suis à plusieurs reprises sentie en insécurité avec l’impression que la nouveauté de cette relation apportait plus à mon conjoint que je ne pouvais le faire, risquant de me faire remplacer.

C’est incroyable de sentir que quelqu'un nous aime suffisamment pour nous laisser vivre quelque chose qui nous fait du bien avec quelqu'un d’autre.

Les premières fois ensemble demandèrent beaucoup d’ajustement mais furent finalement plus simples que je ne l’avais imaginé : le fait d’être présente m’empêchait les cogitations et les fantasmes sur ce qui pouvait être en train de se passer et le fait d’être inclue me rassurait, ce n’était pas un vase communicant où le temps passé avec l’une privait l’autre. Ce n’était pas évident toutefois d’obtenir une triangulation fonctionnelle (car elle n’est que très rarement parfaite) et il y a souvent des tensions ou des incompréhensions. Ne serait ce que sexuellement : il n’est pas toujours facile de gérer les envies dans un duo alors à 3, le bon timing ou la bonne pratique peut-être dure à synchroniser .

Quoi qu’il en soit nous avons rapidement développé de l’amour les uns pour les autres et tout cela a soulevé beaucoup de beauté ; c’est incroyable de sentir que quelqu'un nous aime suffisamment pour nous laisser vivre quelque chose qui nous fait du bien avec quelqu'un d’autre, mais aussi de la souffrance, particulièrement autour des soucis évoqués plus haut (jalousie, sentiments de dépossession, insécurité). La problématique majeure étant la suivante : on est jamais la personne la plus importante pour l’autre car il y en a une seconde.

L'évolution de ma vision du couple et de l'amour

Ce qui nous a aidé, même si aujourd'hui cette relation est terminée et qu’elle le fut dans la douleur, au delà bien sûr de la communication indispensable, ce fût de prendre du temps privilégié pour chacun, des moments à trois mais aussi en duo, dans toutes les configurations.

Prendre le temps de faire en sorte que chacun.e se sente spécial.e pour l’autre, qu’il puisse avoir un temps seul avec un.e partenaire ou un.e autre, qu’il y ait une intimité à deux et un rapprochement plus « naturel » en face à face. Il reste toujours plus aisé de créer de l’intimité à deux avant d’en faire à trois ou davantage.

Je me pensais très monogame en terme de sentiments et polygame seulement sur un plan plus sexuel, mais au final j’ai vraiment aimé cette expérience, la sensation d’être doublement aimée et de ne pas avoir à faire de choix. Quel bonheur que la possibilité d’avoir des sentiments pour plusieurs personnes et de se donner physiquement à elles, avec les nouveautés, les différences de sensations et d’émotions que cela procure. J’aime particulièrement le contact de la peau et ce toucher unique et propre à chaque personne. Parfois même, on voit naître une passion nouvelle ou renaître celle qui n’était plus toujours en jeu dans le couple principal si celui ci est installé depuis longtemps et celle-ci nous met sur un petit nuage.

Cela m’a même suivi dans mes relations suivantes puisque, je me suis depuis séparée aussi du partenaire avec lequel j’ai vécu cette relation de "trouple", mais ai réalisé très tôt que cette multiplicité et cette diversité étaient essentiels pour moi, mon équilibre et mon bien-être. Rapidement, moi qui voulait d’abord rester libre de tout engagement sentimental, je suis retombée amoureuse d’un homme avec qui j’ai entamé une relation, vigilante à ce que chacun garde sa liberté à côté.

Prendre le temps de faire en sorte que chacun.e se sente spécial.e pour l’autre, qu’il puisse avoir un temps seul avec un.e partenaire ou un.e autre.

Nous ne vivons pas ensemble et nous laissons la possibilité d’avoir par ailleurs autant de relations que nous voulons et selon des modalités propres à chacune sans se poser trop de questions. Ceci était pour moi une condition non négociable à toute relation et tout à fait dans la vision de mon nouveau partenaire. Très peu de temps après, je me suis encore rapprochée d’un vieil ami et la relation est progressivement devenue plus sérieuse et affectueuse que nous ne l’avions envisagé.

La relation à trois
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Finalement, l’équilibre de ces deux relations m’apportent aujourd’hui énormément mais cela est toutefois loin d’être simple à garder et à gérer. Chacun de mes partenaires accepte mes autres relations par amour et respect pour moi mais aucun n’y est vraiment confortable. Ils ne souhaitent ni se voir, ni se parler et je ne vois jamais le premier en présence du second, chacun essayant d’ignorer l’existence de l’autre.

Bien sur il n’est donc pas question ici de parler réellement de relation à trois comme dans le cas que j’évoquais au dessus mais n’en apparaît pas moins en être une certaine forme d’où l’on peut, je crois, tirer de l’expérience.

J’essaie de mettre en place tous les ajustements possibles afin que personne ne se sente délaissé et tente de faire ressentir comment, pour moi, chaque relation et chaque sentiment est unique et complètement indépendant de l’autre. Pour l’instant, cela suffit mais jusqu’à quand ? Nous sommes tous lucide sur l’évolution et les écueils de cela.

Comment faire fonctionner plusieurs relations amoureuses à la fois ?

Alors qu’est ce qui fait que, malgré les réticences, la relation fonctionne ?
La leçon majeure que je retiens aujourd’hui est surtout celle de ne pas imposer son mode de pensée. Clairement, les deux hommes avec qui je suis aujourd’hui n’étaient ni prêts ni dans la volonté de l’être mais ce qui fait que c’est acceptable c’est de respecter la façon dont chacun gère les choses.

Dans une relation poly par exemple, moi j’aime avoir les détails, savoir ce qui se passe, avec qui etc... C’est ma façon d’être rassurée alors j’ai longtemps pensé que la transparence absolue était une clé nécessaire au bon fonctionnement de ce type de rapports, or c’était une erreur. Bien sûr, il faut rester ouvert aux questions de son partenaire et être prêt à se mettre à nu à sa demande, même si cela n’est pas facile.

Toutefois j’ai réalisé qu’en voulant trop bien faire, par soucis d’honnêté je donnais trop d’informations non sollicitées à mon compagnon, chose qu’il n’était pas prêt à entendre et qui ont pu le blesser. Il me semble nécessaire de communiquer les relations avançant. Aujourd’hui, l’un d'entre eux suit les mêmes principes que moi et a besoin de savoir. Nous communiquons beaucoup sur mes attentes, le pourquoi de ces modalités et comment chacun s’y retrouve.

L’autre au contraire, ne désire savoir que le minimum, si un nouvel individu entre dans ma vie par exemple, mais ne veut aucune information sur quand, la fréquence ou tout autre détail. Le sujet ne vient sur la table qu’une fois puis nous n’en parlons plus jusqu’à ce qu’il y ait modification. Ce fût longtemps pour moi une mauvaise manière d’agir car c’était nier les faits pour sa tranquillité d’esprit alors qu’il s’agit en réalité d’une manière comme une autre de gérer ses émotions face à une situation que l’on ne maîtrise pas totalement. Cela, c’est respecter la limite de celui/celle qu’on aime et tout commence à cet endroit.

 

Qui est l'auteure ?

La relation à trois
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Melainya est une artiste et performeuse française arpentant la scène lyonnaise mais aussi internationale. Elle débute dans les milieux artistiques par la photographie et explore de nombreux univers comme ceux du Shibari (bondage japonais), du fétichisme, du BDSM et de la culture gothique. Au fil des années, elle diversifie ses activités en explorant un monde plus en mouvement grâce à la performance et aux tournages pour des groupes de metal extrême. Habituée des scènes underground, elle présente régulièrement des shows, aussi bien dans des soirées techno, des événements privés que pour des festivals musicaux. Depuis deux ans, elle est également la co-organisatrice de soirées pour les fétichistes du latex dans sa ville de coeur.

 
 
 

 

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