Découvrir que je suis une femme, ce fut un choc, un véritable big bang.
Je ne l'avais pas vu venir, loin de là. Je menais une existence loin de toute discrimination, loin de tout sexisme, dans ma petite bulle faite d'égalité et de solidarité.
Naïvement, j'étais un être humain avant tout.
Naïvement, j'étais l'égale de tous les autres êtres.
Par Eva
Être une femme dans la société
Je déménage dans une grande ville, et là, le drame survient : on me suit dans la rue, on m’injurie, on me harcèle.
Et pourquoi ? Parce que j'ai une paire de seins, un vagin et non pas « un pénis ».
Vous savez, la théorie (fumeuse) de Freud sur ce fameux « manque », qui ferait d'une femme un être incomplet. Je l'ai prise en pleine face cette théorie. Je ne te remercie pas Freud.
Avant, j'avais vaguement conscience que j'étais différente de mes confrères dotés d'un pénis. Certes, on nous apprend dès la petite enfance les notions de genre : J'ai constaté avec consternation lors d'une séance shopping pour l'arrivée d'un bébé dans mon cercle d'ami.e.s qu'on en est encore à des vêtements bleus pour les garçons et roses pour les filles. Aux poupées pour les filles et les dinosaures pour les garçons. Les garçons c'est coriace, les filles c'est tout doux.
Ça change fort heureusement, mais pas si vite qu'on pourrait le croire.
Avec une telle éducation sociétale, comment est-ce que cela ne m'avait pas sauté aux yeux avant ? Je ne sais pas, mais tout est devenu plus clair, plus évident, douloureusement évident. J'ai commencé à réaliser que si je parlais trop de sexe ou que si je mettais un décolleté trop grand (Oui, il semblerait qu'il existe un guide de la tenue décente même si je ne l'ai jamais trouvé dans ma librairie préférée), j'étais une salope, une provocatrice, une traînée. De celles qui n'attendent « que ça ».
Mon corps de femme attire, choque, provoque, est sujet à débat.
Rien de neuf sous le soleil me direz-vous.
Il n'y a pas si longtemps que cela, les femmes avec un mode de vie différent étaient considérées comme des outsiders qui ne devaient leur liberté qu'à leur manque de décence.
Qu'une femme puisse être maîtresse de son corps, sans vergogne, en toute impunité, comment est-ce possible, tolérable, acceptable ?
Courtisanes, écrivaines, poétesses, peintres, exploratrices, philosophes...
Des gros mots pendant des siècles.
Des rôles-modèles aujourd'hui (pas partout malheureusement).
Dans la société : Sainte ou salope ?
Et pourtant, ma vie sexuelle, le nombre de partenaires avec lesquels j'ai couchés me définissent encore, au XXIème siècle.
Des poils sur ce corps de femme, MON corps de femme? Grand dieu, honte et scandale, n'y-a-t-il pas suffisamment de rasoirs, de cire, ou crème dépilatoire sur le marché ?
Je ne suis pas maquillée, j'ai l'air fatiguée. Je suis trop maquillée, j'ai l'air d'une voiture volée.
Cache donc ce corps que je ne saurais voir. Montre-le un peu tout de même, il faut que mon imagination soit titillée mais que mon âme demeure pure de toute souillure.
Ah oui, tu as 30 ans, qu'en est-il des enfants ? Une femme sans enfant, elle est incomplète. Il faut toujours qu'il y ait quelque chose en elle pour être entière, un enfant, un pénis.
Alors, être une femme, ce n'est que souffrance et humiliation pour des raisons biologiques et sociétales? Est-ce une fatalité, mon destin en tant qu'être humain désigné sous le nom de femme que de subir les affres que d'autres ont décidé de m'infliger ?
Dans la sphère du privé : Eva, juste Eva
Ma place de femme dans la société, elle est à définir et redéfinir chaque jour. C'est une lutte contre les préjugés, les stéréotypes, les discriminations et la violence.
Mais est-ce que mon identité doit se définir constamment par rapport à une opposition, une lutte perpétuelle par rapport au monde extérieur ? Quand je suis chez moi, avec des ami.e.s, avec ma famille ou mon conjoint, qu'est-ce qui me définie comme une femme ?
Peut-être dans ma vie sexuelle.
Je me sens femme lorsque je fais l'amour. Lorsque mon corps tout entier manifeste son besoin d'être touché et embrassé.
Lorsque les méandres de mon intimité rencontrent ceux de l'autre dans un rituel bestial et sensuel.
Je me sens femme lorsque je jouis du plus profond de mon corps au plus profond de mon être. Lorsque je peux me laisser aller dans un cocon de douceur et de soin, entourée des bras de mon partenaire.
Sinon, je ne suis rien qu'Eva et surtout Eva. J'essaie d'être en phase avec moi-même, de déconstruire pour mieux reconstruire. Je sème des graines pour réaliser mes rêves. Des fois, elles mettent longtemps à germer, bien enfouies, cachées, loin des conditions idéales pour pousser. Certaines resteront peut-être à l'état de graines toute la vie et ce n'est pas grave. Semer ces graines est déjà en soi une grande satisfaction. Et c'est également une tâche titanesque, qui requiert persévérance, contemplation, travail et oisiveté, et beaucoup d'amour.
J'essaie néanmoins de déterrer ce qui empêche ces petites graines de pousser, toutes ces peurs, ces limites posées par moi-même et une partie de mon éducation. Ce qui est profondément enfoui, ces jugement, démêler l'acquis, les constructions sociales de mon être, de ma substantifique essence.
Qu'est-ce qui m'appartient, qu'est-ce qui ne m'appartient pas ? Ca s'entre-croise, ça se contredit, ça s'enlace, je ne sais pas toujours.
C'est peut-être être ça être une femme ? Faire pousser toutes ces graines en soi pour s'épanouir en tant qu'individu éclairé dans une société quelque peu blafarde ?
Etre une femme : un ressenti, davantage qu'une liste d'explications ?
Plus je réfléchis à ce qu'est être une femme, plus je me rends compte que ce que les soit-disant caractéristiques qu'on accole habituellement à la femme ne se basent que sur des constructions datant d'une autre époque.
Les femmes, toutes maternelles, empathiques, dévouées avec quelques épisodes hystériques?
Certainement pas.
Les hommes, tous des leaders insensibles bien plus raisonnables et constants que les femmes ?
Certainement pas non plus.
Mais ne serait-on que des hommes ou des femmes d'un point de vue biologique ?
Si le genre n'est qu'une construction purement sociétale, qu'est-ce qui explique que certain.e.s se sentent plus femme ou homme, en dépit de leur sexe biologique ?
Je suppose qu'il peut y avoir autant de réponses que d'individus sur Terre et que certaines questions ne peuvent pas avoir que des réponses basées sur un ressenti profond qui échappe à tout raisonnement rationnel.
Si être une femme (ou un homme), est davantage une question de ressenti et de réflexion personnelle, alors, je rêve que les codes, les genres, les standards de beauté soient brisés, comme ils brisent encore tant de gens malheureusement.
Une robe ? En voilà une pour lui, en voilà une pour elle, si il ou elle la désire.
Du maquillage ? Un peu de noir sur ses yeux à lui, un peu de noir sur ses yeux à elle.
Des poils ? Regarde sous tes bras, tes jambes, y'en a-t-il, n'y en a-t-il pas ? On s'en fiche.
Sois belle, sois beau, ou pas. Juste, sois toi.
Qu'importe s'il porte des talons aiguilles et du rouge à lèvre, qu'importe si elle n'en porte pas.
Remettre au goût du jour l'empathie, la tolérance, et l'amour de son prochain et de soi, ne serait-ce pas là la priorité, plutôt que de renier, rabaisser, rejeter ?
Des valeurs humaines, pour des personnes qui ne sont plus toujours très humaines.
Ne pas être traité différemment en fonction de son genre serait une belle avancée sociétale.
Plus de ponts, moins de murs.
Assumer sa singularité, vivre ses différences.
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Avant tout, être humain.
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